Extraits du roman


La côte des naufrageurs



L’hiver inexorablement finit par se présenter. Noir était le ciel, de jour comme de nuit. Noir le froid, noire la gelée sur les dunes, noire la glace recouvrant le lavoir. Bétail et humains se retranchaient dans les chaumières.
La fumée dense avait envahi la grande salle de la ferme. Le vent orienté au suroît, la fumée refoulait de la cheminée. Des récipients épars, posés à même la terre battue recueillaient l’eau qui traversait le toit par endroits. Avec la tempête l’air s’était un peu réchauffé, mais l’humidité traversait les vêtements et chacun s’était rapproché du feu dans l’espoir de sécher un peu. Eugénie, la plus jeune des enfants tirait la jupe de sa mère : « Oh maman, s’il te plaît raconte nous quelque chose ! »

Fine prit les mains de sa fille dans les siennes :
- Ne tire pas sur mes vêtements, je déteste ça ! Allons, venez par ici tous, je vais vous conter une curieuse aventure qui est arrivée à mon propre père alors qu’il n’était qu’un petit garçon. »
Sur ces mots, elle souleva Eugénie et la plaça sur ses genoux
- Dans les années 1860 il y eut un naufrage, parmi tant d’autres, sur nos côtes. Un vaisseau de commerce, surpris dans une tempête, perdit son grand mât et vint s’échouer sur le « bara du », ce gros rocher qui brise devant Rudoloc’h, près de la digue. Le temps était vraiment exécrable et malgré le danger, les goémoniers des hameaux de Kerlouan tentèrent de porter secours aux naufragés (...)



L'éveil des sens



Ambroisine et Eugénie s’étaient avancées dans l’eau jusqu’aux genoux. Elles ne se décidaient pas à aller plus loin tant elle était fraîche. Georgette les vit depuis le haut de la dune qu’elle dégringola en courant.
« Bien le bonjour mesdemoiselles ! cria-t-elle avec entrain.
- Mes respects madame l’épicière ! répondit Ambroisine sur le même ton.
- Bonjour Georgette, dit Eugénie. »
Georgette qui venait de pointer les orteils dans l’eau fit une drôle de grimace.
« Ce qu’elle est froide ! On ne dirait pas que c’est l’été. Mais quelle idée aussi de se baigner à marée basse. Ambroisine, où as-tu la tête ?
- Je ne commande pas la lune, moi ! rétorqua l’intéressée. Est-ce de ma faute si la mer est basse à cette heure-ci ?  Et puis personne ne t’oblige à nous suivre. Serais-tu devenue frileuse depuis que tu travailles à Guissény ? On dirait une touriste ! » Elle se mit à l’imiter : « Ouh, ouh, c’est si froid, ouh là là ! 
- Tu peux bien te moquer j’y serai avant toi, regarde ! se défendit Georgette en s’avançant encore. »
Quand elle en eût jusqu’à la poitrine, sa blouse se mit à flotter autour d’elle, découvrant son postérieur à la joie de ses sœurs qui ne tardèrent pas à la rejoindre.
« Si les hommes nous voyaient ! s’exclama Eugénie en riant.
- C’est que Georgette est une dame à présent ! ironisa Ambroisine.
- Tu n’en es pas loin non plus ! répondit Georgette observant le fessier rebondi de la jeune femme. »
Cela fit naître en elle un curieux sentiment. Ce n’était pas la première fois qu’elles se baignaient ensemble, ni qu’elles se voyaient à demi nues. Elles avaient également partagé le même lit clos. Mais elles avaient bien changé, sauf Eugénie qui était encore une enfant. A présent Georgette trouvait Ambroisine aussi belle qu’indécente. Gênée par le regard de ses sœurs, elle se promit de se procurer un jour un de ces vêtements de bain dont s’affublaient les touristes de Brignogan. Elle enviait les hommes qui pouvaient se baigner en caleçon, tout était tellement plus simple pour eux !



Amour, distance et fidélité, cette éternelle question.



« Des soldats allemands à Guissény, Plouvien, Lannilis…partout ! ça reste quand même difficile à imaginer. J’espère qu’ils se tiennent bien avec nos femmes. Si j’apprenais qu’un seul d’entre eux avait manqué de respect à Georgette, je le… Ben voyons, qu’est-ce que je lui ferais ? Hum, gardons la tête froide : Georgette n’est pas en sucre, elle sait se défendre. A trois mille kilomètres de ma chérie je ne peux pas grand-chose pour la secourir.
N’empêche que si elle était là, on plaisanterait plus. Les copains sont plutôt maussades en ce moment. Sauf quand ils vont au bordel. Alors là ils s’amusent. Tandis que moi, je n’y vais plus. Je suis fiancé, quand même ! Ils peuvent toujours se moquer de moi, je n’irai pas. Georgette m’en voudrait. Bon… elle n’en saurait rien non plus. Quoiqu’on ne sait jamais, il suffit qu’un matelot ne tienne pas sa langue… on rencontre toujours des gars de chez nous dans les équipages. Même des cousins. Il suffit que l’un d’entre eux rentre en permission, lâche le morceau à sa fiancé et là on n’arrête plus la rumeur. C’est plus efficace que Radio Londres !
Non! Je suis un homme de parole...Bien que les femmes arabes soient décidément très belles (...)

1 commentaire:

  1. Ce livre m'a conquis des le début faites comme moi vous saurez l apprécier félicitations à katell et tout mes encouragement pour l avenir

    RépondreSupprimer